Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples

79ème session ordinaire (14 mai au 3 juin 2024)

Déclaration orale sur les défenseurs des droits humains

Point 6 de l’ordre du jour

 

Monsieur le Président,

Nous assistons aujourd'hui à un rétrécissement alarmant de l'espace civique dans de nombreux pays, rendant plus cruciale que jamais la protection des défenseurs des droits humains. Cependant, la prolifération des lois ou projets de loi relatifs à leur protection doit nous inciter à une vigilance accrue. Trop souvent, ces textes encadrent de manière plus restrictive la définition des défenseur.es des droits humains par rapport à la Déclaration de 1998. Ce phénomène résulte parfois de malentendus, mais souvent d'une volonté explicite de contrôler ou de limiter leurs actions.

Prenons l'exemple du Niger. La FIACAT et l'ACAT Niger saluent les avancées de la loi de protection des défenseur.es des droits humains, en particulier la prise en compte des femmes défenseures et des personnes en situation de handicap. Cependant, elles déplorent que la reconnaissance du statut de défenseur.e soit conditionnée à une appartenance à un groupe constitué, alors que nombre de défenseur.es agissent de manière individuelle ou dans des cadres informels. Cette restriction pourrait exclure des voix essentielles de la lutte pour les droits humains.

Un autre exemple préoccupant est l’avant-projet de loi au Togo. Bien que la société civile ait été consultée, les contributions des défenseur.es n’ont pas encore été suffisamment intégrées. Des mesures telles que l’introduction d’une carte de défenseur.e ou la mise en place d’un registre national soulèvent des inquiétudes quant à une possible instrumentalisation de cette loi pour contrôler, plutôt que protéger, les défenseur.es.

De même, en République démocratique du Congo, la loi sur la protection des défenseurs des droits humains comprend des dispositions qui risquent d’accroître le contrôle étatique sur la société civile. Par exemple, l’article 7 impose aux défenseur.es agissant en dehors d’une association de s’enregistrer dans un répertoire national, tandis que l’article 11 exige l’envoi d’un rapport annuel à l’INDH et aux ministères de la Justice et des Droits humains. Ces obligations risquent d’entraver l’autonomie des défenseur.es et de rendre leur travail plus vulnérable aux ingérences.

En parallèle, depuis la levée du moratoire sur la peine de mort en RDC en février, la société civile abolitionniste subit des représailles sans précédent. Les défenseur.es de l’abolition font face à des menaces, du harcèlement, des agressions physiques, des arrestations arbitraires ainsi qu’à des convocations abusives.

La FIACAT appelle la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples à prendre des mesures urgentes face à cette situation préoccupante et à assurer une véritable protection aux défenseur.es des droits humains en Afrique.

Je vous remercie.