Burundi : L’escalade des violences pré-électorales dans un contexte de répression des voix dissidentes compromet la tenue d’élections libres et transparentes

 

Paris, Genève, le 28/02/2024

 

Alors que les élections législatives, communales1 et sénatoriales2 de 2025 approchent, nos organisations sont préoccupées par la recrudescence des violations des droits humains ciblant les membres et sympathisants de l’opposition, dans un climat d’impunité persistant.

Ces violations, associées à des restrictions légales récentes, compromettent sérieusement la tenue d’un scrutin crédible et inclusif.

Le 7 décembre 2024, le Président de la République du Burundi a promulgué un décret qui interdit les coalitions de candidats indépendants et impose des mesures restreignant la possibilité pour des candidats de l’opposition de se présenter 3.

Quelques jours après la promulgation de ce décret, le 31 décembre 2024, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) a rejeté les listes de candidats députés de la nouvelle coalition «BurundiBwaBose»(BBB)4 etcellesdeplusieursautrespartispolitiques5 aumotifqueceslistes ne respectent pas plusieurs dispositions du code électoral burundais6 . Toutefois, le 7 janvier 2025, cette décision a été invalidée par la Cour constitutionnelle qui a accordé un délai de 3 jours au parti Congrès National pour la Liberté (CNL) et à la coalition BBB pour réaménager leurs listes de candidats aux élections législatives.

Ces mesures s’inscrivent dans un contexte plus large de ciblage des membres de l’opposition par le parti au pouvoir, exacerbée par le renforcement des moyens humains et matériels des membres de la ligue des jeunes du parti au pouvoir, le Conseil national pour la défense de la démocratie – Forces de défense de la démocratie (CNDD-FDD), appelés les Imbonerakure. Ces derniers mènent une campagne systématique de menaces, de discours de haine, d’incitation à la violation, d’arrestations et de détentions arbitraires et de disparitions forcées des membres de l’opposition. S’y ajoutent des recrutements forcés de jeunes, y compris des mineurs, ainsi que des contributions monétaires forcées imposées aux citoyens en faveur du Parti au pouvoir. Les violations des droits humains sont facilitées par l’absence d’observateurs électoraux internationaux et par le refus répété du gouvernement burundais de coopérer de façon substantielle avec les organes et mécanismes internationaux de protection des droits humains. Cette situation se déroule dans un contexte d’aggravation de la crise socio-économique marquée par une pénurie de carburant et d’électricité, une corruption endémique, un manque d’eau potable, et une inflation galopante des prix des produits de première nécessité. Ces facteurs augmentent l’insécurité et contraignent la population à l’exil. Par ailleurs, la situation sécuritaire à l’Est de la République Démocratique du Congo risque d’étendre le conflit armé au Burundi et d'entraîner des violations massives et indiscriminées des droits humains contre les civils.

Face à cette situation alarmante, nos organisations appellent la communauté internationale à redoubler la vigilance et à maintenir un suivi rigoureux du processus électoral burundais.

Nous recommandons instamment :

➢  Une pression diplomatique accrue sur les autorités burundaises pour qu’elles respectent les engagements internationaux en matière de droits humains en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples ;

➢  Le renforcement de la surveillance de la situation des droits humains au Burundi par les mécanismes régionaux et internationaux de protection des droits humains, particulièrement à l’égard des journalistes, défenseur.es des droits humains et activistes qui font régulièrement l’objet de violations des droits humains en raison de leur activité. 

Il est impératif que les acteurs régionaux et internationaux prennent des mesures concrètes pour prévenir une nouvelle crise politique et humanitaire au Burundi. Seule une mobilisation soutenue pourra garantir un processus électoral crédible et respectueux des droits fondamentaux des citoyens burundais.

Nos organisations continueront de surveiller de près la situation et de documenter les violations afin d’identifier les auteurs de ces exactions dans l’intérêt de la justice et afin que les victimes obtiennent réparation.

Les organisations signataires : 

    • ACAT Burundi
    • Association des Journalistes Burundais en Exil (AJBE)
    • Association burundaise pour la protection des droits de l’homme et des personnes détenues (APRODH)
    • Coalition Burundaise des Défenseurs des Droits de l’Homme (CBDDH)
    • Coalition burundaise des défenseurs des droits de l’homme vivant dans les camps des réfugiés (CBDH/VICAR)
    • Coalition Burundaise pour la Cour Pénale Internationale (CB-CPI)
    • Coalition de la société civile pour le monitoring électoral (COSOME)
    • Collectif des Avocats pour la défense des Victimes de crimes de droit international commis au Burundi (CAVIB)
    • DefendDefenders (East and Horn of Africa Human Rights Defenders Project)
    • Ensemble pour le Soutien des Défenseurs des Droits Humains en Danger (ESDDH)
    • FIACAT
    • Forum pour la Conscience et le Développement (FOCODE)
    • Forum pour le Renforcement de la société civile au Burundi (FORSC)
    • Light for all
    • Mouvement INAMAHORO
    • Mouvement des femmes et filles pour la paix et la sécurité au Burundi (MFFPS)
    • Réseau des Citoyens Probes (RCP)
    • SOS Torture Burundi
    • Tournons la Page Burundi
    • Union Burundaise des Journalistes (UBJ)