Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples

69ème session ordinaire (15 novembre au 5 décembre 2021)

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Point 3 de l’ordre du jour : situation des droits humains en Afrique

 

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs les commissaires,

La FIACAT rappelle que 2021 marque le 40ème anniversaire de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. Cet anniversaire offre une occasion unique pour l'UA et ses États membres de renouveler leur engagement en faveur de la ratification, de la domestication et de la mise en œuvre des normes et standards continentaux et internationaux en matière de droits humains.

La FIACAT salue l’Union africaine pour sa campagne « The Youth Silencing the Gun ». Elle tient a rappeler que le 28 juin 2019, l’Assemblée générale des Nations unies votait la résolution 73/304 qui visait à « mettre fin au commerce des instruments de torture » à travers l’élaboration d’une nouvelle norme internationale en la matière. Depuis la remise à l’Assemblée générale en décembre 2020 d’un rapport du Secrétaire général sur ce même sujet, un groupe de 10 experts gouvernementaux étudie la possibilité d’établir de telles normes. Notre organisation demande à la Commission si les Etats africains seront associés à l’élaboration de cette proposition et, le cas échéant, dans quelle mesure. Nous espérons que les États du continent pourront s’exprimer à ce sujet.

 

Monsieur le Président,

La FIACAT et la Coalition mondiale contre la peine de mort portent, depuis 2015, de concert avec le groupe de travail sur la peine de mort un programme visant à encourager l’abolition de la peine de mort en Afrique subsaharienne. Nous souhaitons souligner la progression de la cause abolitionniste sur le continent. Depuis 2015, date d’adoption du projet de Protocole additionnel à la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples portant sur l’abolition de la peine de mort, ce sont 6 pays qui ont aboli la peine de mort en droit, la Sierra Leone ayant gonflé ces rangs le 8 octobre 2021. Grâce à la grande implication de la société civile africaine, ce programme tient ses promesses et nous appelons la Commission et son Groupe de travail sur la peine de mort à continuer de le soutenir activement dans sa mise en œuvre.

 

Monsieur le Président,

Dans quelques jours, le Bénin sera examiné par les Commissaires. La FIACAT souhaite alerter la Commission sur la recrudescence de cas d’infanticides rituels et de mutilation génitale qui nécessitent à la fois une meilleure protection des victimes par l’État mais aussi d’une plus grande sensibilisation des populations concernées.

Par ailleurs, bien que la FIACAT salue les efforts entamés par le Bénin pour lutter contre la surpopulation carcérale, nous invitons la Commission à recommander à l’État de poursuivre sur cette voie en prenant davantage de mesures législatives et budgétaires qui permettront d’améliorer les conditions de détention dans les prisons du pays. L’accès aux soins et la prise en compte de la vulnérabilité des détenus, notamment en fonction de leur âge ou de leur genre, sont par exemple encore loin d’être optimales. Enfin, la FIACAT souhaite mettre en garde contre l’absence de transparence des institutions pénitentiaires vis-à-vis de la société civile alors que ces dernières années ont vu la communication des chiffres s’opacifier et les autorisations de visites se raréfier.

 

Monsieur le Rapporteur Spécial sur les défenseurs des droits humains,

La FIACAT se réjouit de la récente libération de Germain Rukuki après avoir passé près de quatre années en détention en raison de son action en faveur des droits humains au Burundi. Sa persécution témoignait de la grave dégradation de la situation des droits humains dans le pays observable depuis 2015.

Bien que l’Etat fasse de cette libération un exemple de réels progrès en la matière, ceux-ci restent trop lents et un grand nombre de défenseurs restent encore incarcérés dans le pays pour leurs engagements en faveurs de la promotion et du respect des droits humains. De sérieuses défaillances persistent également : l’INDH burundais souffre toujours d’un clair manque d’indépendance tandis que la libération tardive de Monsieur Rukuki, qui s’apparentait à de la détention arbitraire selon l’article 9 du régime pénitentiaire burundais, a prouvé que la justice demeurait dysfonctionnelle et manipulée.

 

Monsieur le Président,

La FIACAT souhaite porter à l’attention de la Commission l’existence d’une importante campagne visant à dépénaliser les délits mineurs dans les pays africains à laquelle elle participe.  Cette ambitieuse campagne portée par de nombreuses organisations de la société civile africaine anglophone et francophone, mobilise des partenaires techniques tels que l’OIF et ses membres. La FIACAT est prête à mobiliser ses membres pour la mener à bien et invite la Commission à accompagner une campagne dont les résultats pourraient exercer une influence directe et positive sur les conditions de détention dans de nombreux pays, notamment en matière de surpopulation carcérale.

 

Monsieur le Président,

La FIACAT espère que l’Union africaine saura consolider les travaux de la CADHP à travers l’African Governance Architecture. Cette restructuration des moyens donnés aux représentants spéciaux, aux experts des groupes de travail et plus généralement à la Commission devrait effectivement pouvoir aboutir à une indépendance des mécanismes spéciaux, particulièrement au niveau financier, alors que celle-ci a été mise à rude épreuve par la pandémie et ses conséquences, tant sanitaires que politiques.

Je vous remercie Monsieur le Président.