Journée internationale pour le soutien aux victimes de torture : appel à la dépénalisation des délits mineurs au Bénin, au Cameroun, au Congo, en Côte d’ivoire et à Madagascar
26 juin 2025
Ce rapport a été cosigné par 15 organisations (liste ci-dessous).
Résumé exécutif
Les délits mineurs sont des délits de faible gravité passibles d’une peine non privative de liberté telle qu’une amende, ou, de manière alternative ou cumulative, d’une courte peine d’emprisonnement. Ces infractions, souvent formulées en des termes vagues, permettent une répression ciblée de certaines catégories de population : personnes précaires, sans-abris, travailleur·ses du secteur informel, migrant·es, jeunes, ou militant·es.
Au Bénin, au Cameroun, en Côte d’Ivoire, à Madagascar et en République du Congo, les lois pénalisant les délits liés à la pauvreté, tels que la mendicité ou le vagabondage, entrainent l’arrestation de personnes en situation de précarité. La pénalisation des délits mineurs sert également à réprimer les comportement jugés déviants tels que la consommation d’alcool ou de produits stupéfiants, la prostitution ou la sorcellerie ; et les transgressions aux normes sexuelles, reproductives et familiales que sont l’homosexualité, l’adultère et l’avortement. Parallèlement, l’espace civique est restreint par des dispositions législatives pénalisant la liberté d’expression et la liberté d’association, utilisées contre les activistes, journalistes et défenseur·es des droits humains à des fins politiques.
Ce rapport analyse comment la répression des délits mineurs, loin de reposer sur des actes causant un préjudice réel, repose sur des comportements réels ou présumés liés à la pauvreté, au statut ou à l’activisme. En s’appuyant sur le droit pénal des États précités ainsi que sur les instruments et mécanismes régionaux et internationaux de protection et de promotion des droits humains, le présent rapport souligne que :
- la pénalisation des délits mineurs expose de manière disproportionnée des personnes vulnérables et marginalisées à un risque accru d’arrestation et d’incarcération en raison de leur place au sein de la société et dans l’espace public ;
- la détention préventive est utilisée de manière systématique pour les délits mineurs, en grande partie car les personnes ciblées manquent des ressources nécessaires pour s’acquitter des amendes ou pour bénéficier d’une défense juridique adéquate ;
- cette pratique alimente l’engorgement des juridictions et la surpopulation carcérale, à l’origine de conditions de détention assimilables à des mauvais traitements ;
- les personnes ciblées par les délits mineurs cumulent souvent des facteurs de vulnérabilité, ce qui les expose à des conditions de détention d’autant plus dégradées qu’elles sont inadaptées à leurs besoins spécifiques, compromet gravement leurs chances de réinsertion à long terme et renforce leur stigmatisation.
Ces constats appellent à une action urgente des États pour réviser ou abroger les lois pénalisant les délits mineurs ciblant la pauvreté, le statut et l’activisme, et invitent à engager une réforme profonde du cadre légal et des pratiques judiciaires en adoptant une approche centrée sur les droits humains. La réalisation d’une étude juridique approfondie sur le lien entre la pénalisation des délits mineurs et l’interdiction de la torture ainsi que des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, s’impose comme une étape essentielle.
Cosignataires
- ACAT Bénin
- ACAT Cameroun
- ACAT Canada
- ACAT Congo
- ACAT Côte d’Ivoire
- African Policing Civilian Oversight Forum (APCOF)
- Dullah Omar Institute
- Fédération internationale des ACAT (FIACAT)
- Harm Reduction International (HRI)
- Omega Research Foundation
- Organisation contre la torture en Tunisie
- Organisation mondiale contre la torture (OMCT)
- Penal Reform International (PRI) – Africa
- Prison Insider
- Relais Prison Société