Madame la Présidente,

Mesdames et Messieurs les Commissaires

La FIACAT et ses 16 ONG membres en Afrique subsaharienne sont particulièrement préoccupées par la dégradation de la situation des droits de l’homme en Afrique notamment dans le cadre de processus électoraux. Face à ce constat, elles souhaiteraient attirer l’attention de la Commission sur plusieurs situations particulièrement alarmantes.

Madame la Présidente,

Les violations graves des droits de l’homme continuent de se perpétrer au Burundi. En mars 2018, l’ACAT Burundi a documenté 27 assassinats, 29 arrestations arbitraires et détentions illégales et 16 cas d’atteintes à l’intégrité physique. Ces violations des droits de l’homme restent largement commises par et sous le contrôle du parti au pouvoir, le CNDD-FDD, et les miliciens Imbonerakure en complicité avec certains éléments des forces de l’ordre.

Depuis le 24 octobre 2017, la campagne de terreur menée par le gouvernement s’est intensifiée pour contraindre la population à voter oui au référendum de mai 2018 visant l’adoption du projet de révision de la Constitution qui permettrait notamment à Pierre Nkurunziza de briguer deux nouveaux mandats de 7 ans. Sont visées par cette répression toute personne accusée de ne pas aller s’enrôler, d’empêcher d’autres de le faire ou de faire campagne pour le non.

Les défenseurs des droits de l’homme continuent d’être menacés et réprimés pour leurs actions. A titre d’exemple, Germain Rukuki, ancien comptable de l’ACAT Burundi arrêté en juillet 2017 en raison de sa collaboration avec l’ACAT Burundi, a fait l’objet d’un procès ne respectant pas les garanties d’un procès équitable. Plusieurs charges retenues à son encontre n’ont pas fait l’objet d’une instruction et il n’a pas été assisté de son avocat lors des interrogatoires par le Service National de Renseignement. Alors qu’à l’issue du procès, les avocats de la défense ont demandé l’acquittement de leur client face à des poursuites arbitraires et instrumentalisées, le Ministère Public a requis l’emprisonnement à perpétuité. Germain a été condamné le 26 avril 2018 à 32 ans d’emprisonnement. Il convient également de noter que la vice-Présidente de l’ACAT Burundi actuellement en exil a également fait l’objet d’une répression arbitraire, son passeport ayant été annulé afin de l’empêcher de se déplacer.

Il est essentiel que la Commission et l’Union africaine s’impliquent davantage aux côtés de la communauté est-africaine dans la recherche de solutions de sortie de crise et pour protéger la population et les défenseurs des droits de l’homme burundais.

Madame la Présidente,

La situation en République démocratique du Congo est également très préoccupante. Ces derniers mois, le gouvernement de la RDC a violemment et systématiquement réprimé toutes les manifestations pacifiques organisées par le Comité Laïc de Coordination. Cette organisation avait appelé la population à marcher les 31 décembre 2017, 21 janvier 2018 et 25 février 2018 afin de réclamer l’application intégrale de l’accord de la Saint Sylvestre. Cependant, ces marches ont été réprimées dans le sang : tirs à balles réelles, usage de gaz lacrymogènes périmés et vandalisme et profanation des églises par les forces de l’ordre. Ainsi, l’ACAT RDC a enregistré et documenté plus de 100 cas de violations des droits de l’homme sur l’ensemble du territoire à l’occasion de ces marches dont 15 cas d’exécutions sommaires ou extrajudiciaires par la Police Nationale Congolaise, l’Agence Nationale de Renseignements, les Forces Armées de la République Démocratique du Congo et la Garde Républicaine. Ces évènements sont survenus postérieurement à la publication en novembre 2017 par la Commission électorale nationale indépendante d’un calendrier électoral prévoyant les élections présidentielles et législatives pour le 23 décembre 2018 soit un an après la date fixée par l’Accord de la Saint Sylvestre et sans aucune garantie réelle que cette date soit respectée et que Joseph Kabila quitte le pouvoir.

La Commission et l’Union africaine doivent prendre les mesures nécessaires pour lutter contre l’impunité et garantir la tenue d’élections présidentielles et législatives crédibles et dans un climat pacifique.

Madame la Présidente,

Il convient également de dénoncer et condamner la répression violente par les forces de l’ordre des manifestations organisées les 11 et 14 avril derniers au Togo par la coalition des 14 partis politiques de l’opposition et interdites par le gouvernement. Au cours de ces manifestations, l’ACAT Togo a recensé 1 mort, 174 blessés dont 92 dans un état grave et 27 arrestations pour rébellion, destruction et voie de fait. 17 des personnes arrêtées ont été condamnées le 17 avril 2018 à des peines d’emprisonnement et les 10 autres ont été libérées.

Il est primordial que la Commission condamne fermement ces actes et défende le droit à la vie, le droit à l’intégrité physique et la liberté d’expression.

Je vous remercie de votre attention