58ème Session ordinaire de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples

Banjul, Gambie, 6 - 20 avril 2016

Point 9 de l’ordre du jour : Rapport d’activités des membres de la Commission et des mécanismes spéciaux

Déclaration orale de la FIACAT sur les travaux de Monsieur le Rapporteur Spécial sur les Prisons, les Conditions de Détention et l’Action Policière en Afrique

Madame la Présidente,

Monsieur le Rapporteur Spécial sur les Prisons, les Conditions de Détention et l’Action Policière en Afrique,

La Fédération internationale de l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture, la FIACAT, et les membres de son réseau œuvrant dans les prisons, sont fortement préoccupés par les conditions d’accueil déplorables des détenus dans les prisons africaines qui, pour une grande majorité d’entre elles, datent de l’époque coloniale et ne répondent plus à la mission qui leur a été confiée. Les détenus séjournent dans des cellules insalubres, manquant souvent de ventilation et de lumière. L’hygiène y est sommaire, la nourriture rationnée et de qualité douteuse, et les activités de resocialisation quasi inexistantes. Certains détenus ne sortent presque jamais de leurs cellules.

A ces conditions déplorables s’ajoute une surpopulation carcérale endémique.

Madame la Présidente,

Nos prisons débordent ! À l’origine conçues pour accueillir un nombre défini de détenus, elles accueillent aujourd’hui jusqu’à cinq fois plus de prisonniers que leur capacité ne le permettent. C’est notamment le cas à la prison de Kinshasa, la Makala, qui accueillent aujourd’hui plus de 7 000 détenus pour une capacité d’accueil de 1 500 prisonniers.

Cette surpopulation carcérale est en grande partie la conséquence de l’utilisation excessive de la détention préventive. Ce qui, à l’origine était une mesure exceptionnelle est devenue la règle. Les dossiers s’empilent dans les tribunaux du fait du manque de moyens matériels, financiers et humains, mis à leur disposition par nos gouvernements, auxquels s’ajoutent les dysfonctionnements internes de l’appareil judiciaire et le manque de collaboration entre les différents acteurs de la chaîne pénal.

Il est monnaie courante que le traitement des dossiers des personnes en détention préventive dépassent les délais légaux. La détention préventive, alors jugée abusive ou excessive selon les pays, constitue une infraction grave commise par nos États. De plus, depuis de trop nombreuses années, nos systèmes judiciaires privilégient l’enfermement aux peines alternatives à la détention et placent des personnes en prison pour des délits mineurs, augmentant de manière significative la surpopulation carcérale et le risque de récidive.

Madame la Présidente,

La FIACAT félicite une nouvelle fois la CADHP pour avoir adoptée les Lignes directrices sur les Conditions d’Arrestation, de Garde à vue et de Détention Provisoire en Afrique lors de sa 55ème Session ordinaire.

Pour permettre d’accueillir les détenus dans des conditions respectant la dignité humaine et les droits de l’homme, la FIACAT :

- Appelle les États membres de l’Union africaine à réhabiliter les prisons, à dépénaliser les délits mineurs et à avoir recours à des peines alternatives comme les travaux d’intérêt général pour limiter la surpopulation carcérale ;

- Invite la Commission à établir des standards clairs concernant les conditions de détention en prison comme la taille minimum des cellules par détenus ou les équipements obligatoires ;

- Encourage la Commission à définir ce qu’elle entend par « délai raisonnable » lorsqu’il s’agit du délai de jugement d’un détenu en détention préventive.

Je vous remercie.