Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples

81ème session ordinaire (17 octobre au 6 novembre 2024) 

Déclaration orale sur la situation des défenseur·es des droits humains

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Point 5 de l’ordre du jour

Rapport d’activité du Rapporteur spécial sur la situation des défenseurs des droits humains

Monsieur le Président de la Commission, Honorables Commissaires,

La FIACAT, la FIDH, Ensemble contre la peine de mort (ECPM), Tournons La Page (TLP), Agir ensemble pour les droits humains (AEDH) sont profondément préoccupé·es par l’augmentation des cas de représailles envers les défenseur·es des droits humains.

L'espace civique, pierre angulaire de la liberté d'expression, d'association et de réunion, est aujourd’hui gravement menacé dans plusieurs pays du continent. La multiplication des législations restrictives et des actes d'intimidation et de violences à l'encontre des défenseur·es des droits humains et de leurs associations met en péril les droits fondamentaux, que cette Commission s'efforce de protéger.


Dans de nombreux États, des lois prétendument conçues pour lutter contre la criminalité ou le terrorisme sont détournées pour cibler les DDH. Ces lois imposent des restrictions sévères à l'encontre des associations, des syndicats et des mouvements sociaux. En Tunisie, par exemple, de nombreuses associations sont depuis des mois victimes de pressions, de harcèlement et menacées de dissolution.


Au-delà des entraves juridiques, les défenseur·es sont confronté·es à des menaces directes, des actes d'intimidation et des violences visant à les museler. En Guinée, deux membres de l'organisation Tournons la Page et du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC) ont été enlevés en raison de leur engagement pour la démocratie. Cet incident marque une escalade inquiétante de la répression contre ceux qui œuvrent pour les droits de leurs concitoyen·nes.

En outre, les défenseur·es militant pour les droits des personnes LGBTIQIA+ sont encore plus vulnérables dans des contextes de forte stigmatisation sociale et juridique. En Côte d'Ivoire, des organisations soutenant les droits des personnes LGBTIQIA+ subissent des représailles violentes à cause de leur engagement. Ces attaques mettent en lumière la nécessité urgente de renforcer la protection légale de ces communautés marginalisées.

L'utilisation abusive des systèmes judiciaires pour réprimer les défenseur·es constitue une autre forme de répression qui s’accentue. Les poursuites infondées et les procès inéquitables sont devenus des outils de coercition utilisés contre les voix dissidentes. Un exemple particulièrement préoccupant concerne les avocat·es en République démocratique du Congo, qui ont dénoncé la levée du moratoire sur la peine de mort et se retrouvent désormais ciblés par des actions judiciaires abusives.

Face à cette situation alarmante, il est indispensable que les États africains adoptent des lois spécifiques pour protéger les défenseur·es des droits humains, et se conforment à leurs obligations et engagements régionaux et internationaux.

Nous appelons instamment la Commission africaine à continuer de jouer un rôle déterminant en exhortant les États à garantir l’ouverture de leur espace civique et à protéger les défenseur·es contre toutes formes de représailles. Votre action est cruciale pour accompagner les autorités nationales dans l’adoption de cadres législatifs solides et protecteurs, à la hauteur des défis actuels.

Je vous remercie.